Même dans le silence le plus total, Julie, Franck et Antoine entendent des bruits:
sifflements, bourdonnements, tintements, bruits de train ou de machines diverses qu'ils sont seuls
à percevoir et qui sont sans rapport avec leur environnement auditif. Ils sont victimes
d'acouphènes.
Ce phénomène qui survient à tout âge n'a rien de commun avec les hallucinations auditives
("les voix").
Il s'en distingue par le contenu rudimentaire des bruits entendus (dépourvus de sens) et par le fait
que l'on est conscient de leur origine interne.
En France, environ 6 millions de personnes seraient
touchées dont 150000 sévèrement affectées car leur présence permanente perturbe le sommeil, le
travail et tous les actes de la vie quotidienne.
D'après une enquête du Coast Community College District of California (États-Unis), 24% des
acouphènes trouvent leur origine dans une exposition à des bruits excessifs, 43% sont de cause
inconnue.
D'autres sources ont été identifiées: les problèmes circulatoires, l'hypertension, des déséquilibres
faciaux relevant du dentiste ou du stomatologue (qui traite des maladies de la bouche et des
dents)
(Néanmoins, précisons que les mal-occlusions dentaires sont une cause extrêmement rare
d'acouphènes, et de nombreux acouphéniques convaincus de ce diagnostic ont dépensé des
fortunes pour réparer les erreurs du dentiste ou du stomatologue, sans résultat).
Des causes métaboliques (diabète, cholestérol), médicamenteuses ou toxiques, enfin des
problèmes cervicaux (arthrose, contractures de la région cervicale).
Des filtres détraqués :
Les acouphènes sont provoqués par un dysfonctionnement de la transmission des sons au cerveau.
Cette compréhension des mécanismes acouphéniques est due au Pr Jastreboff (années 1980).
Les cellules nerveuses (auditives et autres) émettent en permanence des signaux de toutes sortes.
En temps normal, ceux-ci ne donnent pas de perception consciente car nous disposons d'un certain
nombre de filtres qui effectuent un tri, et classent sans suite une grande partie des signaux émis
(mécanisme d'habituation).
Lorsque l'un ou plusieurs de ces filtres sont abîmés, des signaux non pertinents s'acheminent
jusqu'au cortex cérébral et donnent naissance à une perception.
Dans le cas des acouphènes, le
phénomène s'aggrave sur les personnes qui focalisent leur attention sur ces perceptions insolites et
n'entendent plus qu'elles jusqu'à l'obsession.
L'acouphénique, (nom donné à la victime d'acouphènes), se retrouve comme une mouche dans un
bocal.
Des causes multiples :
On distingue les crises d'acouphènes aiguës qui se manifestent la plupart du temps à la suite d'un
traumatisme sonore (concert, explosion) psychologique (rupture familiale, choc émotionnel) ou
consécutivement à la prise de médicaments toxiques pour l'oreille.
La seule façon de les juguler et d'éviter qu'elles ne deviennent chroniques est de les traiter en
urgence. La prescription de vasodilatateurs est fréquente. Sans que l'on sache expliquer son mode
d'action, c'est un des rares traitements qui fait parfois effet.
Les acouphènes chroniques ne sont plus liés à une circonstance particulière, ils se sont "installés"
plus ou moins rapidement. Présents de manière continue ou presque, ils perturbent profondément.
Les causes sont presque toujours multiples. Il peut s'agir au départ, comme on l'a vu, d'un bruit
fort perçu en période de fatigue ou de choc émotionnel. Mais il est rarement possible -et même
dangereux- de ramener les acouphènes à une origine unique.
Le parcours d'un acouphénique est assez typique.
Il commence chez le médecin généraliste qui, démuni, l'adresse à l'ORL. Celui-ci réalise un bilan
auditif, et fait procéder à des examens complémentaires (analyses de sang, scanner IRM, etc.).
La plupart du temps, tous ces examens permettent seulement d'éliminer certaines hypothèses plus
ou moins graves (problèmes dentaires, tumoraux, etc.) mais ne révèlent rien d'anormal.
Côté traitements, les médecines alternatives apportent parfois -c'est un constat-, des
améliorations plus ou moins durables.
En faisant appel à la médecine traditionnelle chinoise (acupuncture et pharmacopée),
l'homéopathie, l'ostéopathie, la chiropratique, ou la phytothérapie, certains ont vu leurs
acouphènes diminuer, voire disparaître.
Mais le résultat tant attendu n'est pas souvent au rendez-vous, les "bruits" lancinants sont toujours
présents occasionnant découragement, solitude, dépression.
Gérer les acouphènes :
Si aucun traitement médical n'est efficace à lui seul, il existe cependant des moyens de gérer ses
acouphènes.
À défaut de pouvoir les traiter radicalement à la source, on cherche à rétablir l'efficacité des filtres
qui empêcheront le signal-parasite de devenir perception en atteignant le cortex cérébral.
C'est la
base de la technique de la TRT (Tinnitus Retraining Therapy: thérapie d'habituation des
acouphènes (tinnitus, en anglais) mise au point par le Pr Jastreboff.
Elle consiste à réhabituer le système auditif à considérer les acouphènes comme naturels en
reprogrammant les réseaux neuronaux chargés de les détecter.
La TRT associe plusieurs éléments.
D'abord des entretiens, indispensables pour expliquer les mécanismes qui conduisent à la
formation d'acouphènes. Ils visent à dédramatiser la situation, à sortir de la logique du "Vous
devez vivre avec", et à adopter une attitude positive.
S'aider des témoignages d'acouphéniques ayant réussi à maîtriser leur problème, cela incite à
s'engager sur la même voie qu'eux. Ils permettent aussi d'insister sur les effets nuisibles des bruits.
Prodiguée suffisamment tôt, cette information peut suffire à éviter d'entrer dans la ronde infernale
des acouphènes permanents et de pérenniser le problème.
Il sera utile d'associer aux moyens déjà évoqués, l'apprentissage d'une technique de relaxation
ayant pour but de diminuer les réactions physiologiques engendrées par l'acouphène.
Enfin la dernière étape consiste en une thérapie par le bruit : elle utilise soit des bruits de
l'environnement ou l'écoute de musique appropriée, soit des appareils auditifs (ces derniers
peuvent être intégrés aux prothèses auditives lorsque les acouphènes sont associés à la
malentendance) pour retrouver le plaisir des sons.
Le rôle décisif de l'association France Acouphènes
Créée en 1992, l'association France Acouphènes a permis à de très nombreux acouphéniques de
sortir ou mieux, d'éviter d'entrer dans le cercle infernal.
Elle a mis sur pied à travers la France un réseau de délégués qui sont les premiers maillons d'une
chaîne d'entraide et de solidarité, en particulier au travers de permanences téléphoniques. Ces
personnes expérimentées sont capables de bien conseiller sur les ressources disponibles, et de
communiquer les coordonnées de professionnels compétents.
Elle se bat pour la prise en compte du problème par le corps médical (souvent fataliste) et les
pouvoirs publics.
Alors qu'il y a en Grande-Bretagne 200 "Tinnitus Clinic" enseignant la TRT, cette méthode est
encore très peu connue en France.
Acouphènes et ordinateurs :
J'ai des acouphènes depuis 2 ans maintenant.
Tout à commencé à la suite d'une chute stupide avec un coup sur l'arrière de la tête :
- Surdité brusque (-60db sur les aigus).
J'ai consulté les plus grands médecins de Paris : (vaso-dilatateurs, cortisone, rivotril).
J'ai retrouvé une audition presque normale mais pour les acouphènes, rien à faire et les choses se
sont aggravées.
J'ai fini par entendre un train d'atterrissage d'avion jour et nuit.
Il y a deux mois à la suite d'une discussion avec un collègue, j'ai pris la décision de mettre l'unité
centrale du pc derrière une cloison car je suis informaticien et je passe 4 à 5 heures par jour
devant le pc.
Le miracle s'est opéré, cela va beaucoup mieux, ils sont beaucoup moins forts, je n'en souffre que
la nuit et ils sont assez faibles.
J'ai retrouvé une vie normale après plusieurs mois terribles.
J'ai aussi redécouvert le silence total que je ne connaissais plus depuis deux ans.
J'ai redécouvert le bruit des feuilles dans les arbres que je n'entendais plus car il était masqué par
l'acouphène.
Je crois pouvoir faire un bilan de ce qui s'est passé dans mon cas.
La lésion dûe à la chute a été aggravée par les vibrations du pc (ultrasons,infrasons,harmoniques)
Maintenant je sais que les moteurs électriques me font du mal et particulièrement les moteurs qui
tournent à plus de 3000 tours/minutes. L'exposition aux moteurs électriques me déclenche
l'acouphène 8 heures plus tard.
Les médecins se sont tous plantés dans mon cas et aucun ne m'a parlé des vibrations.
A la place d'un effort de recherche des causes environnementales, j'ai eu droit à leurs salades sur
l'habituation, allez voir un psy, etc...
Et le pire de tout: il n'y a pas de remède miracle pour vous.
Le danger des vibrations est connu de tous les ingénieurs en mécanique.
Les phénomènes de résonance sont particulièrement redoutables.
Les matériaux les plus durs comme l'acier entrent en résonance, ils se mettent à vibrer lorsqu'ils
sont soumis à des fréquences excitatrices proches de leur fréquence de résonance propre.
Ainsi, une faible houle peut faire écrouler un pont si elle est proche de sa fréquence de résonance
propre.
J'ai gardé un léger acouphène la nuit. Le plus amusant est que mon acouphène ressemble au bruit
du pc .
Je ne crois pas au hasard, je pense que les fréquences nocives du ventilateur ont touché les
cellules ciliées dont la position sur la cochlée correspond justement à ces fréquences.
Sur le
limaçon les cellules ciliées sont disposées géographiquement des aigüs aux graves.
Je veux continuer à être optimiste.
Je crois qu'il faut miser sur les capacités du corps à se régénérer lorsque l'on supprime la cause.
Et si celà ne suffit pas, on reste plus armé pour trouver un remède lorsque la cause est clairement
identifiée.
Les acouphènes pulsatiles :
Pour la plupart des gens, les acouphènes sont permanents. Cependant, un faible pourcentage (8-
10 %) se plaignent d'acouphènes rythmiques, martelant, pulsatiles.
Normalement, nous n'entendons pas le coeur pompant le sang dans les veines et les artères.
Il arrive cependant que ces pulsations s'entendent au niveau de l'oreille moyenne ou de l'oreille
interne, ou bien du nerf auditif. La perception du flux rythmique du sang dans la tête ou dans la
région du cou prend le nom d'acouphènes pulsatiles.
Ce phénomène se produit quand la tension est haute, dans le cas de tumeurs vasculaires bénignes
ou des vaisseaux sanguins rétrécis.
Il s'agit soit d'acouphènes objectifs si le médecin peut les entendre, soit d'acouphènes subjectifs si
seul le patient les entend.
En général, ils se produisent dans une seule oreille. Ils peuvent être les
symptômes d'un état de santé qui nécessite un contrôle médical sérieux mais où la médecine ou la
chirurgie peuvent intervenir efficacement.
Les acouphènes pulsatiles s'installent graduellement et peuvent augmenter en intensité avec le
temps.
La plupart des patients les ressentent davantage comme une gêne que comme un handicap sévère.
Ils s'en réfèrent à un avis médical lorsque cette condition est associée à d'autres problèmes de
l'oreille.
Une perte auditive, des douleurs d'oreille, du pus ou du sang dans l'oreille, des vertiges, ces
symptômes qui affectent l'oreille moyenne, l'oreille interne et quelques fois les nerfs qui assurent
l'équilibre et qui sont associés aux acouphènes pulsatiles, exigent un examen complet de l'oreille
par un médecin O.R.L. : conduit auditif, tympan et avec un stéthoscope, une recherche, autour de
l'oreille, du cou, de la tête, de sons pulsatiles, ainsi qu'une vérification de la tension.
Un test de l'audition permettra de déterminer si la perte auditive provient de l'oreille moyenne, de
l'oreille interne ou du nerf auditif s'il y a lieu. De plus, la tympanométrie permettra de dire si les
acouphènes ont leur origine dans le canal auditif. Certains types d’acouphènes pulsatiles font vibrer
le tympan chaque fois que les patients les entendent.
D'autres examens peuvent être nécessaires si les symptômes suivants se manifestent : un
sentiment d'engourdissement au niveau de visage, une vision dédoublée, des maux de tête.
Ces
symptômes pourraient indiquer que le problème ne se limite pas au système auditif et une
évaluation plus poussée serait alors nécessaire.
L'angiographie est quelquefois recommandée pour examiner les vaisseaux sanguins de la tête et du
cou afin de rechercher une anomalie dans les artères et les veines qui pourrait être la cause des
acouphènes pulsatiles.
Les acouphènes pulsatiles peuvent être provoqués par de nombreuses maladies (voir tableau) :
l'hypertension facile à diagnostiquer et à traiter ; d'autres peuvent nécessiter une chirurgie, des
radiations ou de la chimiothérapie.
L'athérosclérose, une hypertension intercrâniale bénigne, un souffle cardiaque peuvent être traités
efficacement par des médicaments et souvent, mais pas toujours, les acouphènes sont réduits de
façon notable ou éliminés.
Les acouphènes pulsatiles ne concernent qu'un petit nombre de patients souffrant d’acouphènes.
Ils se produisent en relation directe ou indirecte avec la circulation du sang dans le corps. L'origine
des acouphènes pulsatiles peut souvent être trouvée et ensuite traitée avec succès. Un examen
clinique approfondi et une détection précoce offrent les meilleures garanties de guérison.
Causes des acouphènes pulsatiles :
o Artère carotide aberrante
o Malformations artérioveineuses
o Maladie de Paget (déformations osseuses associées à des troubles vasculaires)
o Anomalies des sinus sigmoïdes
o Anomalies du bulbe jugulaire
o Bruits (hums) des veines cervicales
o Souffle au coeur
o Haute pression artérielle
o Hypertension intracrânienne
o Malformations d’Arnold-Chiari (rares cas congénitaux de prolongation du cerveau et du
cervelet dans la moelle épinière)
o Compression neurovasculaire du nerf auditif
o Tumeurs glomiques
o Trompe d’Eustache béante
o Contractions musculaires persistantes
o Audiologiste
o Lésion très fréquente entrant dans le cadre de l’artériosclérose, elle atteint surtout les
artères de type élastique (aorte et gros vaisseaux).
Acupuncture auriculaire
Je me réjouis de voir qu'il y a de plus en plus de personnes qui se tournent vers l'acupuncture.
Vous avez raison. L'acupuncture peut beaucoup pour les acouphènes et/ou pour tous les troubles
relatés.
Dans le pire des cas, si les acouphènes ne vont pas mieux, il y a de très grandes chances
que vous vous sentiez mieux : plus calmes, moins de tensions, disparition de certains symptômes
connexes comme les céphalées ou migraines, les insomnies, les vertiges, amélioration relative de
l'ouïe , etc...
L'auriculothérapie est une technique qui fait partie de l'acupuncture. Son histoire est assez
intéressante, car très française.
L'acupuncture auriculaire existait déjà en Chine, mais était assez
peu utilisée. Un médecin français, le Docteur Nogier fût intéressé par la chose, l'approfondit ... et
obtint des résultats tels qu'il en fit, après forces années d'études et d'expérimentation clinique ce
qu'il appela : l'auriculo médecine.
A son tour la Chine, séduite par les immenses progrès réalisés par ce médecin français, se remit à
approfondir cette forme de thérapie et recréa une acupuncture auriculaire selon les théories de la
médecine chinoise. Il en résulte qu'il existe actuellement deux sortes d'acupuncture de l'oreille :
celle du Dr. Nogier et la Chinoise.
Face à cette réalité, il faut être essentiellement pratique et ne pas se demander laquelle est la
meilleure. Je crois que chacune d'elle a ses forces. L'important est de trouver un médecin qui
domine bien la technique et qui, de préférence, ait de l'expérience avec les acouphènes.
Il est intéressant de noter que l'acupuncture auriculaire note ses meilleurs effets dans les
problèmes neurosensoriels.
Au point de vue technique, il y a plusieurs méthodes. Soit il y a la simple poncture de plusieurs
points dans l'oreille. Celle-ci peut être aussi activée par l'activation des aiguilles au moyen d'un très
faible courant électrique. Il est aussi possible, d'appliquer un courant électrique sur certains points
d'acupuncture dans l'oreille en y appliquant un pôle relié à une machine productrice de pulsations
électriques (ce qui est une sorte d'acupressure électrique). Toujours indolore ... ou presque.
La dernière méthode consiste à placer des aiguilles ou des semences à demeure sur les points dans
l'oreille : il s'agit d'aiguilles ou de petites boules magnétiques ou de vraies semences (de radis par
ex.) qui sont collés sur certains points et qui restent en place pendant plusieurs jours.
Je suis convaincu qu'à force de chercher vous trouverez les bons acupuncteurs et que nombreux
seront ceux qui s'en féliciteront après coup (parfois après quelques mauvaises expériences, il est
vrai ... mais malheureusement on paie pour apprendre).
Maladie pouvant entraîner un acouphène
* Traumatisme sonore : le traumatisme sonore est la cause la plus fréquente de
l'acouphène. Il est source de lésions de l'oreille interne et plus précisément de fracture des
stéréocils des cellules ciliées externes.
* Artériosclérose.
* Maladie de Paget (maladie osseuse provoquant une expansion des os du crâne et une
pression du nerf auditif).
* Neurinome acoustique (tumeur bénigne du nerf auditif).
* Hypertension artérielle.
* Otite moyenne aiguë ou chronique.
* Cancer de l'oreille.
* Otospongiose (maladie qui réduit la mobilité de l'un des petits os servant à transmettre
les vibrations sonores à l'oreille interne).
* Surdité de perception (phénomène progressif, non douloureux, qui se manifeste
généralement après la soixantaine) appelée également presbyacousie.
* Syndrome ou maladie de Ménière.
* Intoxication par certains métaux lourds comme le mercure contenu dans les amalgames
dentaires.
* Allergies.
* Bouchon de cérumen.
* Anémie (diminution ou inefficacité des globules rouges à transporter l'oxygène dans le
sang).
* Traumatisme cérébral.
* Tumeur du nerf auditif.
* Contractures plus ou moins violentes des muscles du cou.
* Excès de sucre dans le sang (diabète).
* Pollution.
* Perturbations de la circulation sanguine au niveau du cou ou de l'oreille.
* Mauvaise alimentation.
* Médicaments ototoxiques (toxiques pour l'appareil auditif interne).
* Céphalées (maux de tête).
* Dérèglement hépatique.
* Exostose (excroissance osseuse) du conduit auditif externe.
* Perturbations endocriniennes à type d'hyperthyroïdie (sécrétion exagérée d'hormones
thyroïdiennes dans le sang).
* Libération excessive de neuromédiateur (glutamate) source d'hyperstimulation du nerf
auditif correspondant en quelque sorte à une petite épilepsie du nerf auditif.
* Vibrations déclenchées par la marche (clonus du muscle du marteau ou de l'étrier).
* Troubles des mouvements de la mâchoire (articulé dentaire). L'articulé dentaire est le
rapport entre les dents qui s’opposent au moment de la fermeture de la bouche, appelée
également occlusion.
Conférence de Mme Chery Croze le 18 Octobre 2003 à Aix avec les
associations SURDI-13 et FRANCE ACOUPHÈNES
Mme Sylviane CHERY-CROZE directrice de recherche au CNRS
Très rapidement , l’acouphène est une perception auditive que l’on entend dans une oreille ou
dans les deux ou dans la tête sans qu’il y ait de source sonore qui lui corresponde.
Je voudrais attirer votre attention sur cette autre définition « Vécu désagréable à la fois sensoriel
et émotionnel, associé à un dommage tissulaire présent ou potentiel ou simplement décrit en
terme d’un tel dommage » C’est une définition qui n’a pas été écrite du tout pour l’acouphène car
c’est la définition officielle de la douleur telle qu’elle a été adoptée par l’association internationale
d’étude de la douleur.
Il se trouve que cette définition convient tout à fait à l’acouphène qui n’est
pas seulement un phénomène d’oreille. Cela concerne l’individu dans son entier même si, à
l’origine, il y a des causes dans l’oreille.
Quelques données épidémiologiques
Suivant les études et les pays dans lesquels elle sont été réalisées on trouve 10 à 17 %
d’acouphènes dans la population générale.
Il n’y a pas eu d’étude d’envergure en France mais AG2R a récemment fait une enquête dans le
cadre de la Journée Nationale de l’Audition. Elle a montré sur un échantillon bien choisi
représentatif de la population française que 15 % de sujets ont eu à un moment ou à un autre de
leur vie ou ont encore un acouphène. En fait, les études étrangères et cette enquête permettent de
dire qu’environ 2,5 millions de personnes en France, sont gênés par leur acouphènes, dont 300 000
sont en réelle souffrance.
Il est aussi important de noter qu’on note 200 000 nouveaux cas par an
dont beaucoup de jeunes.
Je voudrais rappeler que l’acouphène peut naître dans n’importe quelle partie de l’oreille. Un
simple bouchon de cérumen peut engendrer un acouphène mais dans la grande majorité on pense
que l’origine se situe dans les voies auditives et en particulier dans l’oreille interne pour des lésions
qui peuvent même être très petites.
95% des cas d’acouphènes correspondent à des perturbations périphériques ou situées plus haut
dans les voies auditives.
On parle d’acouphènes neuro-sensoriels. On pense que c’est une activité
nerveuse particulière qui circule dans les voies auditives et qui, quand elle arrive au cerveau au
niveau du cortex auditif donne naissance à un son comme toute activité qui arrive à ce cortex.
C’est cette perception sonore et que vous entendez.
Quels sont les axes de recherche
Il y a différents axes :
1) Caractériser ce signal nerveux particulier qui est à l’origine de l’acouphène
2) Identifier les voies et les centres nerveux qui sont mis en jeu dans le traitement du signal
3) Déterminer quels sont les mécanismes mis en jeu pour que cette activité et son traitement dans
les centres nerveux donne naissance à ce symptôme qui vous fait souffrir .
L’objectif de toutes ces recherches est évidemment de développer de nouvelles approches
thérapeutiques qui vous permettront d’aller mieux.
Tout d’abord le premier axe de recherche : caractériser le signal nerveux de l’acouphène. On le
connaît maintenant ce signal, car des chercheurs ont pu faire des enregistrements et en particulier
chez l’animal. On a pu créer des acouphènes chez les animaux en utilisant des substances
ototoxiques comme par exemple l’aspirine ou la quinine. Quand ces substances ototoxiques sont
injectées à haute dose aux animaux, ces derniers perçoivent des acouphènes. Il est possible de
mesurer l’intensité de ceux ci en développant des modèles comportementaux. C’est ce qui a été
fait à Montpellier : on injecte de l’aspirine après avoir conditionné l’animal à grimper sur un petit
mât situé dans sa cage lorsqu’il entend un bruit.
Dans un modèle animal américain, Jastreboff a pu démontrer que l’acouphène du rat était situé
sur 11 000 Hz quand il est déclenché par l’aspirine et on a pu mesurer son intensité en fonction de
la dose d’aspirine injectée.
Actuellement se développent également des modèles d’acouphènes
déclenchés par un traumatisme auditif.
Lorsqu’on enregistre l’activité du nerf auditif dans un de ces modèles, on s’est aperçu qu’il existe
une augmentation d’activité spontanée.
En effet, les fibres nerveuses déchargent tout le temps,
elles ont une activité aléatoire en permanence : on parle d’activité spontanée.
En présence d’un
stimulus auditif, il se produit un changement (une synchronisation) de l’évolution de la décharge en
fonction du temps,: les décharges se synchronisent sur le stimulus. C’est cette synchronisation qui
permet au système nerveux de repérer la présence d’un stimulus.
Dans ces modèles animaux
d’acouphènes, il existe un début de synchronisation : en présence d’acouphènes, les décharges, au
lieu de se produire de manière aléatoire, se produisent en « bouffées ». C’est à dire qu’on observe
des petits groupements de 2 ou 3 décharges, qui se répètent dans le temps.
L’augmentation globale d’activité spontanée qui a été observée est due à cette activité particulière
« en bouffées », une activité similaire à celle que l’on retrouve dans les foyers épileptiques.
Ce qui
explique que, dans certains cas, on puisse vous prescrire des anti-convulsivants, des médicaments
contre l’épilepsie.
Quelquefois cela fait peur au patient. En fait, c’est simplement parce que l’on sait
que la décharge à l’origine de la perception d’acouphènes est de type épileptique et que des anticonvulsivants
peuvent, dans certains cas, améliorer l’acouphène. Ces substances n’agissent pas
efficacement sur tout le monde mais pour une partie de la population acouphénique elle permet
d’améliorer les choses mais malheureusement pas de faire disparaître.
Cette augmentation d’activité spontanée est retrouvée dans les relais des voies auditives jusqu’au
cortex. Les décharges « en bouffées » sont liées aux propriétés d’une molécule particulière
nommée le glutamate, qui est le neurotransmetteur c’est à dire la substance émise par les
récepteurs auditifs nommés les « cellules ciliées » car elles possèdent plusieurs rangées de petits
cils souples.
Sous l’effet de la vibration sonore, les cils des cellules activées vont s’abaisser et entraîner la
libération de glutamate.
Quand ce glutamate est libéré en quantité trop importante, il provoque cette décharge « en
bouffées » qui est liée à la présence d’un acouphène.
Mais ce glutamate est toxique pour les cellules quand il est présent en trop grande quantité. Or
dans les traumatismes acoustiques, il est libéré en trop grande quantité ce qui peut entraîner le
gonflement et l’éclatement de l’extrémité de la fibre auditive.
A ce stade une régénération reste
possible. Cependant, si le traumatisme est trop important, on peut avoir mort de la fibre auditive
elle-même.
En effet, notre système est bien fait ; quand les lésions en périphérie sont trop
importantes pour permettre une régénération, les fibres nerveuses vont « se suicider ».
Elles sont
programmées pour cela, de manière à avoir une « mort propre » sans libération de substances
nocives pour les tissus environnants.
Ceci pour vous expliquer qu’à des fins thérapeutiques deux types de molécules pourront être
utilisées:: des molécules empêchant le glutamate libéré en excès de se fixer sur les fibres auditives
(anti-glutamates) et des molécules anti-apoptotiques qui vont empêcher la mort programmée
(nommée apoptose) de se dérouler.
C’est sur ces molécules que travaille l’équipe du Pr Puel à
Montpellier. Le problème est que le glutamate est une substance très répandue dans notre cerveau
et qu’elle intervient dans de nombreuses fonctions, par exemple, l’apprentissage et la mémoire.
On
ne peut donc pas utiliser ces substances par voie générale ce qui entraînerait beaucoup d’effets
secondaires nocifs. Il faudra donc, comme cela se fait déjà chez le rat, les injecter directement au
contact de l’oreille interne à l’aide d’un petit cathéter, qui relié à une mini-pompe, traversera le
tympan pour aller diffuser le produit à proximité de l’endroit où il devra agir.
Le second axe de recherche concerne la caractérisation des voies nerveuses impliquées dans le
traitement du signal nerveux de l’acouphène.
Il existe divers arguments en faveur de l’intervention
privilégiée d’une autre voie que celle habituellement empruntée par les sons courants de notre
environnement.
En effet, il existe deux voies différentes qui véhiculent des informations auditives.
Les voies dites primaires sont des voies purement auditives, très spécifiques en fréquence qui
après avoir fait relais dans un certain nombre de structures aboutissent au cortex auditif primaire.
Les voies dites extralemniscales ou secondaires sont quant à elles, beaucoup moins spécifiques en
fréquence, plus diffuses ; les réponses de ses neurones peuvent être excitées et/ou inhibées par
des informations relatives à d’autres modalités sensorielles.
Par ailleurs, ces voies font relais dans la réticulée activatrice où les informations auditives sont
intégrées à toutes les autres modalités sensorielles pour être soumises au tri sélectif de la modalité
prioritaire à l’instant considéré. Ceci est très important car les personnes qui tolèrent mal leur
acouphène effectuent un « mauvais » tri en le classant toujours comme un signal prioritaire alors
qu’il n’a aucun intérêt pour la tâche qu’ils sont en train de réaliser.
De plus, ces voies sont en
relation avec l’hypothalamus et les centres du système nerveux autonome. Ce système contrôle
toutes nos fonctions automatiques (non conscientes) comme le rythme cardiaque, la pression
artérielle, le rythme respiratoire, la motricité digestive, la sudation..toutes fonctions qui sont
activées dans des situations de menace, de stress, de peur.
Ces voies se projettent sur le cortex secondaire ainsi que sur toutes les aires corticales.
Il semble que ce soit cette voie dite secondaire qui traite le signal de l’acouphène : en effet, les
structures dont l’activité spontanée est augmentée sous traitement au salicylate ou en cas de perte
auditive lui appartiennent ; par ailleurs, l’observation de nombreux cas d’acouphènes a révélé que
pour 66% d’entre eux, leur perception est modulée par l’activation du système somatosensoriel par
exemple, des stimulations tactiles ou musculaires de la face ou du cou.
Un autre argument consiste
en l’observation d’ acouphènes sévères déclenchés par des changements de la direction du regard
ou la stimulation tactile de la main chez des patients qui ont subi des interventions pour supprimer
un très gros neurinome ou une tumeur à la base du cerveau.
Ces observations ne peuvent pas s’expliquer par la mise en jeu d’une voie qui ne conduit que les
informations auditives.
De plus, des études d’imagerie dans des cas acouphènes déclenchés par le regard ont montré que
les zones corticales activées correspondent au cortex secondaire.
Ces études ont aussi révélé que d’autres structures cérébrales sont impliquées qui n’ont rien à
voir avec les voies auditives : par exemple le système limbique et l’amygdale ou le système
attentionnel.
Le système limbique régit nos émotions mais c’est aussi un système bien connu pour augmenter
l’anxiété.
Le troisième axe de recherche consiste à déterminer les mécanismes responsables de la survenue
de l’acouphène.
De plus en plus de chercheurs acceptent l’idée que la plasticité cérébrale est très impliquée dans
la mise en place de l’acouphène.
En effet, une des caractéristiques de notre système nerveux auditif ou pas, est d’être plastique. Il
ne va pas fonctionner de la même manière si on lui fournit beaucoup ou peu d’informations.
C’est
la raison pour laquelle on conseille aux personnes malentendante de se faire appareiller tôt pour
éviter que des perturbations centrales s’ajoutent à celles dues à la déficience de l’oreille.
En effet,
la vieillesse s’accompagne d’une diminution de notre plasticité auditive.
Dans ces conditions, la présence continuelle dans les voies auditives du signal nerveux lié à un
acouphène va entraîner une certaine plasticité. Ceci a pu être mis en évidence dans l’équipe
lyonnaise.
On fait entendre dans les oreilles du sujet 3 paires de mots différents, les mots d’une même paire
sont diffusés en même temps dans les 2 oreilles. Après avoir entendu ces 3 paires de mots, le sujet
voit s’afficher un point d’interrogation sur l’écran d’ordinateur placé devant lui. Suivant qu’il se
trouve à droite ou à gauche le sujet a pour consigne de répéter les mots qu’il a entendus dans son
oreille droite ou son oreille gauche.
Généralement, quand cette expérimentation est réalisée chez des sujets qui n’ont pas d’acouphène
on obtient toujours de meilleures réponses dans l’oreille droite qui correspond à l’hémisphère
gauche, que dans l’oreille gauche/hémisphère droit.
En regardant les résultats de cette
expérimentation, on s’aperçoit que dans tous les groupes de sujets acouphéniques ou pas, on
obtient l’asymétrie classiquement décrite sauf chez les sujets qui ont un acouphène dans l’oreille
droite, qui n’ont plus de fonctionnement asymétrique. On a donc de bonnes raisons de penser que
c’est la présence de l’acouphène dans l’oreille droite qui perturbe cette fonction cérébrale de la
reconnaissance du langage.
Donc, bien qu’on ne puisse pas montrer l’acouphène lui-même, on peut néanmoins mettre en
évidence les effets de sa présence.
Ceci est aussi possible avec des moyens sophistiqués comme l’imagerie ou la
magnétoencéphalographie.
Il faut savoir que tout au long de notre système auditif, on trouve une organisation fréquentielle
nommée tonotopie corticale. Les fréquences différentes que l’on entend ne sont pas organisées
n’importe comment .
Dans notre oreille se trouve la cochlée en forme de limaçon. Si on déroule ce
dernier, on se trouve devant une sorte de clavier de piano présentant les aigus du côté de l’oreille
moyenne et les graves à l’autre bout, tout à la pointe du limaçon, les fréquences voisines se
trouvent tout au long proches les unes des autres.
Cette particularité qu’on appelle la tonotopie ,
se retrouve tout le long des voies auditives jusqu’au cortex dans lequel les fréquences sont aussi
organisées dans l’espace.
L’existence d’une plasticité cérébrale chez les acouphéniques a été démontré à l’aide de la
magnéto-encéphalographie : c’est un examen qui permet de voir quelles sont les zones qui sont
activées dans le cerveau des patients.
On a comparé des sujets atteints d’acouphènes unilatéraux
sans perte auditive marquée à des sujets contrôles sans acouphènes ; les sujets ont été stimulé
par des fréquences comprises entre 1000 et 8000 Hz ; on constate, chez les contrôles, que toutes
ces activations se trouvent alignées sur une droite.
La seconde image est celle de sujets ayant un acouphène sur 6000 Hz. On remarque que sur la
fréquence de l’acouphène, l’activation n’est plus du tout alignée sur la droite , mais située en
dehors d’elle. Cela montre que notre cortex est réorganisé suite à la présence de cet acouphène.
Conclusion : en présence d’un acouphène, il existe une réorganisation de la représentation des
fréquences dans le cortex auditif et les chercheurs ont pu également observer que plus l’intensité
subjective de l’acouphène est forte et plus le degré de réorganisation cortical est important.
Le même type de phénomène a été observé pour un autre symptôme : celui de la « douleur » ou
perception « dite de membre fantôme ».
On a en effet constaté que certains amputés pouvaient percevoir des sensations dans la zone
corporelle qui leur avait été enlevée.
Par exemple, sur un sujet auquel on a enlevé une main, on remarque que la zone du cortex qui
correspondait aux projections de la main, répond maintenant à des stimulations du visage et de
l’avant –bras c’est-à-dire à des stimulations des aires corporelles qui se projetaient de part et
d’autre de la zone corticale sur laquelle se projetait la partie enlevée.
Ce sont les zones qui sont
situées de part et d’autre de l’aire de projection de la partie enlevée, qui vont progressivement
envahir la région laissée libre.
On s’est alors demandé si l’acouphène qui est dans plus de 90% lié à la présence d’une perte
auditive ne serait pas l’équivalent de cette perception de membre fantôme.
Dans cette figure, vous pouvez voir des audiogrammes précis réalisés en utilisant des fréquences
très proches distantes de 500 Hz seulement.
Sur ce schéma, les seuils auditifs apparaissent comme
des ronds blancs. Puis pour caractériser finement le spectre de l’acouphène, on refait écouter au
sujet les mêmes fréquences que celle de l’audiogramme en demandant au sujet de dire si ce son
appartient à son acouphène et, si oui, dans quelle proportion il participe à son acouphène en
utilisant un chiffre compris entre 0 et 10.
Ces notes apparaissent sur le schéma sous forme de
ronds rouges.
Dans les 6 exemples donnés sur ce schéma, on voit que les composantes dominantes de
l’acouphène sont situées dans la perte auditive, qu’elles correspondent à une bande de fréquence
relativement large et que le spectre de l’acouphène est pratiquement l’inverse de la perte auditive.
Ce résultat est en faveur de l’hypothèse selon laquelle l’acouphène serait similaire à la perception
de membre fantôme : ce sont les fréquences manquantes qui sont entendues.
Dans ces conditions si l’acouphène est bien l’inverse de la perte auditive, on doit pouvoir
envisager une stratégie thérapeutique inspirée des thérapies proposées chez les amputés pour
supprimer la sensation de membre fantôme.
On place la personne devant un miroir, le bras gauche
devient par reflet le bras droit. Par ce biais, on redonne au système nerveux une information
visuelle correspondant au bras manquant par le biais de la vision en miroir, et ainsi, on diminue la
sensation de membre fantôme.
En ce qui concerne l’acouphène, nous n’avons encore fait qu’une expérience préliminaire.
Les
sujets étaient entraînés à une tâche très fine consistant à entraîner les gens à distinguer des sons
de fréquences proches dans la zone qui correspond à leur acouphène.
Dans le schéma qui vous est présenté, en blanc, c’est l’acouphène avant les séances
d’entraînement et en rouge l’acouphène après les séances d’entraînement (sujet ayant un
acouphène bilatéral dont on a entraîné seulement l’oreille droite.
On remarque qu’après 7 séances de 2 heures pendant lesquelles on les fait travailler sur des
fréquences comprises dans le spectre de leur acouphène, le spectre de ce dernier est modifié : il a
perdu ses composantes aiguës.
Il est possible qu’en améliorant cette technique, il soit possible de diminuer la plasticité auditive
correspondant à l’acouphène. Pour tenter d’inverser ou au moins de rétablir un état plus proche de
ce qui existait avant l’acouphène.
Conclusion :
J’espère qu’à travers cet exposé qui ne représente qu’une toute petite partie de ce qui se fait, je
vous ai convaincus que même si vous avez l’impression qu’on ne fait rien pour vous, des
recherches sur l’acouphène se développent à travers le monde et que progressivement on
comprend de mieux en mieux les mécanismes qui président d’une part à sa naissance et d’autre
part à sa pérennisation.
Par ailleurs, des avancées thérapeutiques, paraissent prévisibles bien que l’on on ne puisse
aujourd’hui dire dans quel délai elles aboutiront. Cependant, ces pistes donnent de l’espoir. Ce sont
par exemple, les injections de substances neuroprotectrices ou anti-apoptotiques dont je vous ai
parlé dans le modèle du Pr Puel, qui devraient permettre de contrecarrer la pérennisation de la
perte auditive et de l’acouphène survenu suite à un traumatisme sonore ou bien d’éviter la perte
auditive lorsqu’on est obligé d’utiliser des médicaments ototoxiques.
Ainsi, on pourrait tout à fait
imaginer d’injecter des substances otoprotectrices lors de traitements anti-cancéreux par exemple.
Une autre piste serait d’inverser la plasticité cérébrale associée à la présence d’un acouphène soit
en faisant une rééducation comme dans l’essai réalisé à Lyon dont je viens de vous parler, soit en
effectuant des stimulations électriques ou magnétiques.
Ainsi, en Belgique, dans les cas
d’acouphènes intolérables présents sur une oreille totalement sourde, un neurochirurgien pose sur
les méninges (une des membranes qui protègent notre cerveau), au contact de notre cerveau mais
sans le pénétrer, un porte électrode portant 12 électrodes.
Au départ, il utilisait toujours le même schéma de stimulation. Dès qu’il a stimulé, le patient
n’entendait plus du tout son acouphène, mais au bout de 2 mois, un nouvel acouphène est apparu,
résultant de la plasticité cérébrale sous l’effet de cette stimulation permanente. Il a alors changé
pour une stimulation aléatoire avec un schéma de stimulation qui variait lui aussi dans le temps ;
cela fait maintenant environ 10 mois que le patient ne souffre plus du tout d’acouphène.
Quatre
autres sujets ont été implantés. Les résultats semblent pour l’instant tout aussi positifs. Mais cela
reste une intervention extrêmement lourde.
Une autre technique permettant d’inverser la plasticité, réside dans les stimulations magnétiques.
Mais ici le problème est aujourd’hui, l’équipement qui est très encombrant. Cependant, il faut
garder espoir car les choses avancent.
Les acouphènes sont dus à des causes multiples, il ne faut pas attendre de traitement unique qui
viendra à bout de tous les acouphènes d’un seul coup.
Toutes les pistes doivent être développées
afin de pouvoir aider le plus de monde possible.
Actuellement, il existe des possibilités d’aide.
Plus ou moins accessibles à l’heure actuelle, elles
doivent se développer de plus en plus. C’est la raison pour laquelle je pense que les associations
ont vraiment un rôle très important à jouer car c’est grâce à elles que vous pouvez infléchir les
choses, par exemple pour mettre plus de moyens pour la formation des ORL (pour les
audioprothésistes c’est désormais inscrit à leur programme d’études), pour la création de cliniques
spécialisées et pour la recherche.
Vingt cas qui peuvent provoquer des acouphènes :
1. Acouphènes et muscles de l'oreille
Il existe manifestement des acouphènes en rapport avec une anomalie des muscles de l'oreille
moyenne: les acouphènes sont à type de grésillements, de claquements faisant évoquer des
myoclonies, modifiés ou non par la mise en tension des muscles du cou. Par exemple, les
acouphènes sont modifiés par la rotation de la tête. Faut-il inclure cette étiologie dans un tableau
nosologique plus large, incluant aussi l'étiologie "ATM"?
Plusieurs types de traitements sont proposés: médicaux ou chirurgicaux - myorelaxant, anticontracturant,
infiltration péri-tubaire, mise en place d'aérateur, section du muscle du marteau...
2. Acouphènes et sas
C'est là encore un problème de concomitance. La relation de cause à effet butte sur les difficultés
exposées pour les acouphènes et les exostoses.
On ajoute la cohérence des âges entre acouphènes et SAS, la cohérence des morphotypes et des
surcharges métaboliques...S'agit-il donc plus d'un problème de relation de cause à effet ou de comorbidité...
Quoiqu'il en soit, les informations vis à vis du sommeil sont aussi pour cette raison une donnée
essentielle à recueillir...
3. Sténose du conduit et exostose
On trouve assez régulièrement des exostoses et des sténoses du conduit auditif externe
concomitantes avec des acouphènes.
La relation de cause à effet n'est pas démontrée, ni n'est démontrée cette concomitance forte entre
exostose ou sténose et acouphènes. Il faudrait disposer des chiffres suivants : fréquence des
acouphènes avec et sans sténose dans la population, fréquence des exostoses et sténoses avec et
sans acouphènes. Ces mesures sont inaccessibles.
Le mécanisme pourrait être celui d'une inflammation chronique... Il est pourtant intéressant de
se pencher sur cette étiologie compte tenu du caractère éventuellement curable de cette anomalie
bien identifiée. Ce type d'acouphène s'accompagne volontiers d'otalgie.
4. Acouphènes et articulation temporo-mandibulaire
La suspicion de dysfonctionnement de l'articulation temporo-mandibulaire est évoquée: sur la
présence d'un acouphène UNILATERAL (ce qui fait rechercher une cause locale), avec une
désaxation mandibulaire, des craquements, des soins dentaires dans les semaines précédentes
(prothèses ou avulsion), une dysharmonie dento-maxillaire, la notion d'orthodontie dans l'enfance.
Typiquement il existe un syndrome douloureux péri-auriculaire, en projection sur les zones
musculaires régionales.
Mais ce dernier symptôme est rare ce qui fait d'une part douter du diagnostic, et d'autre part ce qui
limite la mise en route de traitements locaux invasifs. Un signe clinique mérite d'être recherché : la
relation possible entre la position de la mandibule pendant le sommeil et l'horaire de l'acouphène.
L'acouphène du syndrome de dysfonctionnement de l'ATM est sans doute plutôt un acouphène du
matin. La palpation endo-buccale peut déclencher une douleur. Dans l'ensemble ce diagonstic est
sur-représenté, poussés que nous sommes pour trouver une étiologie à l'acouphène unilatéral à
audition normale ou anormale mais symétrique.
Cette question mérite en soi un développement à part: comme les dysfonctionnements de l'ATM
(ou plutôt les symptômes de dysfonctionnement) sont très fréquents (jusqu'à 70% de la population
adulte dans certaines publications), comme l'acouphène est aussi très fréquent, alors c'est bien
que les seconds sont dûs aux premiers... Quel péché contre le raisonnement... Le moine Bayes doit
se retourner dans sa tombe...
5. Acouphènes et mauvaise nouvelle...Choc affectif...
On tombe ici dans un domaine hypothétique dont la réalité peut être fortement critiquée. Pourtant,
la question devant une surdité brusque : "avez vous entendu juste avant cet épisode auditif une
parole que vous ne souhaitiez pas entendre...", fournit des réponses souvent très éclairantes.
Essayez... Vraisemblablement 25% de réponses dans ce sens... A vérifier... Dans une
symptomatologie si psycho-dépendante, il n'y a pas lieu d'accepter cette relation pour la
thérapeutique et de la refuser pour sa génèse.
L'acouphène est peut-être, à ce titre, un équivalent de la surdité brusque.
6. Acouphènes et médecine interne
C'est sans doute une classification de certitude difficile à établir. On peut bien sûr évoquer : les
pathologies de surcharge (diabète, hypercholestérololémie...), les maladies inflammatoires
chroniques, les troubles de la coagulation, les anomalies syndromiques sans étiologie confirmée.
Ces pathologie interviennent rarement sans atteinte auditive. La relation directe est difficile à
établir. A l'instar des maladies de l'oreille interne rapportées à une pathologie auto-immune, il faut
apporter la preuve thérapeutique. De façon puriste, la constatation concomitante d'une anomalie
générale n'est pas suffisante pour affirmer la relation directe et certaine entre l'acouphène et
l'anomalie constatée.
Dans cette classification, on exclura ici les troubles observés de la tension artérielle qui font l'objet
d'un groupe à part. Pour ce genre de pathologie, le bilan biologique minimal est : C Reactive
Protein,... (voir le bilan mis au point pour l'étude GEBS).
7. Acouphènes et otite séreuse, labyrinthite...
Dans cette classe d'acouphènes, on a retenu les acouphènes dont la survenue est concomitante
ou immédiatement postérieure à un épisode tubaire soit infectieux, viral ou bactérien, soit
barotraumatique comme un voyage en avion, soit encore en association.
Le terme de labyrinthite ne préjuge en rien du mécanisme pathogénique. Que faut - il incriminer :
une lésion mécanique d'enfoncement, la toxicité d'un exsudat inflammatoire?
Pour les acouphènes après otite séreuse, le scanner montre souvent la présence d'une opacité
mastoïdienne. Malheureusement, les traitements anti-inflammatoires, mêmes corticoïdes, sont peu
efficaces. Sont-ils prescrits trop tardivement?
8. Acouphènes et otospongiose
On a retenu dans cette statistique les otospongioses à tous les niveaux de son implication : en
pré-opératoire, en post-opératoire. L'acouphène de l'otospongiose peut être de 2 types : de
tonalité grave, ou plutôt à type de bruit, faisant évoquer un mécanisme membranaire - de tonalité
aiguë, plutôt rattaché à un mécanisme neuro-sensoriel, non-membranaire.
L'acouphène à type de bruit peut disparaître après la chirurgie. On n'a pas retenu pour cette
statistique les acouphènes transitoires, post-opératoires immédiats.
9. Acouphènes et traumatisme crânien
Les acouphènes de cette classe diagnostique sont souvent associés à une cophose posttraumatique.
De façon étonnante, les acouphènes sur oreille cophotique peuvent être déclenchés
au bruit, vraisemblablement par stimulation contro-latérale.
Il faut alors sans doute impliquer le système efférent médian, ce qui fournit un modèle physiopathologique
intéressant. Mais cette situation est plutôt le fait des acouphènes avec cophose postopératoire.
La situation clinique acouphènes et cophose est au plan thérapeutique à la fois favorable et
défavorable: défavorable car ni prothèse ni masquage conventionnels ne peuvent être utilisés,
favorable car on peut certainement envisager dans un futur proche la possibilité de mettre en place
une stimulation électrique permanente qui pourra masquer, voire blanchir l'acouphène c'est à dire
l'annuler complètement. Ce serait l'indication d'un type d'implant cochléaire. Mais encore faut - il
que l'habituation ne se fasse jamais.
Au plan du mécanisme, on hésite toujours entre commotion labyrinthique et fistule. L'acouphène
isolé post - traumatique voit ses chances d'être rattaché à une fistule péri-lymphatique chuter à un
peu plus de 10%.
Vraisemblablement, l'exploration de l'oreille moyenne est idéalement faite sous A.L.
10. Acouphènes et traumatisme sonore
Le traumatisme sonore peut-être relevé à l'interrogatoire ou à l'audiogramme avec un scotome
classique sur le 4kHz. Ceci se justifie car le patient ne se souvient pas toujours d'un traumatisme
sonore ancien. C'est manifestement la cause première des SUJETS QUI CONSULTENT.
Vraisemblablement aussi des acouphènes, en général.
Si la législation dans le domaine du travail protège mieux le travailleur, la législation en matière de
loisir n'est pas encore au point... Lire éventuellement "l'orl et le traumatisme sonore".
Il faut expliquer au sujet les différents mécanismes des lésions.
11. Acouphènes et hyper-tension artérielle...
Les troubles de la tension artérielle sont fréquemment observés chez les patients qui présentent
des acouphènes. On rappelle, qu'en France, il y a 8 millions d'hyper-tendus et 4 millions de sujets
qui disent souffrir d'acouphènes. Hypertension artérielle et acouphènes surviennent sur le même
terrain : celui de la 2 ème moitié de la vie. Il y a lieu chez un patient traité de vérifier la date de
mise en route du traitement anti-HTA et la date de survenue de l'acouphène. On pourrait évoquer,
non pas une hypertension, mais une hypotension, en particulier, mais sous toutes réserves, dans l'
acouphène qui survient dès le réveil. Il y a lieu, dans ces cas, éventuellement de faire pratiquer un
monotorage nocturne de la tension. Dans les cas favorables, l'horaire, voire l'anti-hypertenseur
peuvent être modifiés.
Mais finalement, si cette hypothèse est régulièrement soulevée, les conclusions sont rarement
utiles pour le patient.
12. Acouphènes et cycle hormonal
Cette étiologie existe vraisemblablement, tout comme le syndrome prémenstruel.
13. Acouphènes et fistule péri-lymphatique...
La fistule péri lymphatique dans son polymorphisme symptomatique peut certes être génératrice
d'acouphènes.
Chaque élément qui contribue à renforcer l'hypothèse étiologique est le bienvenu : notion de
traumatisme, de surdité fluctuante, de vertige, de troubles de l'équilibre au changement de
position, de symptomatologie changeant à l'effort, de signe de la fistule...
La seule constatation de la notion de traumatisme, de signe auditif avec acouphènes, correctement
reliés au traumatisme doit pouvoir faire poser l'indication d'une exploration de caisse (voir le
chapitre spécifique)
14. Acouphènes et souffle carotidien
C'est en fait un acouphène objectif. Sa présence ne justifie pas toujours un traitement spécifique.
L'auscultation du cou fait partie de l'examen clinique systématique de l'acouphène.
15. Acouphènes et boucle V / VIIII...
Par boucle V/VIII, on décrit des acouphènes qui sont modifiés par la pression digitale en un
endroit de la tête. Ce signe n'a pas de raison de ne pas être pris en compte même s'il apparait
obscur dans son explication. C'est le souci de constituer des groupes homogènes de patient qui
l'isole.
Il est à noter que l'infiltration d'anesthésiques localement n'influe pas sur le symptôme.
16. Acouphènes et neurinome du VIII...
Le neurinome du VIII est la grande crainte étiologique de l'acouphène.
Il faut redire l'importance de l'approche statistique présentée au chapitre acouphènes et
exostoses.
Cette hypothétique présence du neurinome devant tout acouphène est très coûteuse par l'examen
radiologique systématique qu'elle déclenche.
Si l'IRM n'est à pratiquer, pour ce diagnostic qu'après un bilan de la fonction audio-vestibulaire,
elle a l'avantage de montrer d'éventuelles lésions diffuses centrales, faisant alors évoquer une
vascularité.
17. Acouphènes et otospongiose
On a retenu dans cette statistique les otospongioses à tous les niveaux de son implication: en
pré-opératoire, en post-opératoire.
L'acouphène de l'otospongiose peut être de 2 types : de tonalité grave, ou plutôt à type de bruit,
faisant évoquer un mécanisme membranaire - de tonalité aiguë, plutôt rattaché à un mécanisme
neuro-sensoriel, non-membranaire.
L'acouphène à type de bruit peut disparaître après la chirurgie.
On n'a pas retenu pour cette statistique les acouphènes transitoires, post-opératoires immédiats.
18. Acouphènes et pathologie cervicale...
Au même titre que le syndrome de Barré et Liéou dans les atteintes vertigineuses, l'implication
d'une pathologie cervicale dans la génèse de l'acouphène est sujette à caution. Il est pourtant des
cas où l'acouphène est survenu de façon directe et certaine après des manipulations cervicales.
Les traitements anti-inflammatoires et myorelaxants, l'ostéopathie douce peuvent avoir un effet
bénéfique non pas tant vis à vis d'une disparition de l'acouphène qu'au niveau d'une amélioration
du bien-être général du patient.
Faut-il évoquer ce mécanisme dans les acouphènes modifiés par la position, en particulier
survenant en position allongée?
19. Acouphènes et surdité brusque
Les surdités brusques récupèrent souvent une bonne qualité auditive, mais peuvent garder
comme séquelle un acouphène rebelle. La situation est d'autant plus critique que la récupération
auditive est de mauvaise qualité : l'oreille est à la fois gênante et inutile...Quid des thérapeutiques?
Quid du caisson?
20. Reflux gastro-oesophagien
Cette étiologie ne peut être envisagée que sur la présence de signes cliniques non spécifiques tels
que le pyrosis, de dysphonie, de pharyngite matinale... et de signe spécifique comme l'existence
d'une otalgie.
Dans l'état actuel de nos connaissances, il n'y a pas lieu d'envisager une PH-métrie
systématique devant un acouphène qui n'a pas fait sa preuve étiologique.
Le traitement d'épreuve, s'il existe des signes non spécifiques, peut être acceptable.